Qui, pas trop jeune, ne se souvient du succès phénoménal des représentations de » l’Oiseau vert » à la Comédie ? Ce furent les débuts remarqués d’un scénographe qui acquerra une renommée internationale: feu Jean-Marc Stehlé.
C’est dire l’audace du metteur en scène Michel Favre pour relever cette année la gageure de donner la pièce dans la salle communale d’un paisible village genevois, vous avez lu Cartigny, du 7 au 24 mai dernier. Certes les succès de la troupe du Trabli se sont enchaînés. Souvenons-nous des « Mystères de Paris », de « la Cerisaie », des « Joyeuses commères de Windsor ». Avec cette dernière pièce, la troupe a remporté le grand prix au festival de Friscènes à Fribourg et en a donné un extrait au festival de théâtre genevois, à côté des professionnels.
Il fallait donc maintenir haut le flambeau et le choix de la pièce était délicat. Michel Favre a choisi cette pièce de Carlo Gozzi, revisitée par Benno Besson, qui demandait à la fois audace et précision.
Audace parce qu’il fallait créer une panoplie de costumes beaux et sortant de l’ordinaire et des décors astucieux. Cornelius Spaeter, Eric Wuarin et Jean-Philippe Bolle – un trio magique – n’ont pas déçu nos attentes. Précision parce que le texte décrivant, dans l’ambiance de la comedia del arte, des événements invraisemblables devait être donné à la fois clairement pour permettre la compréhension et avec fantaisie pour donner vie à des personnages extravagants.
La troupe du Trabli a fait honneur à sa réputation, chaque année grandissante, en nous offrant à apprécier une œuvre travaillée avec intelligence, où la folie des protagonistes cachait la sueur des acteurs. Mentionner l’un ou l’autre serait une erreur. C’est le cœur d’une troupe soudée que l’on a vu battre sur la scène de Cartigny.
Bravo le Trabli, bravo Michel. Et à l’année prochaine !
Pierre Boggio, ex-délégué genevois de la Fédération Suisse des Sociétés Théâtrales d’Amateurs.